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La Route du Crabe

25 août 2019

Belek

> Le troisième chapitre de cette escapade aoutienne s’ouvre à Belek et se fermera à Antalya. Je retrouve la famille et l’aire de jeu de M. depuis le 9 juillet, date de son arrivée. Il dispose d’une terrasse qui donne sur une piscine, d’un petit bassin pour prendre confiance, d’un grand pour oser des choses, d’un petit peu de verdure pour y faire des plantations (mission déjà accomplie), de deux ou trois amis de presque son âge pour constituer son système amical, d’une anne-anne aimante donc serviable, d’un dede attendri, d’une voiture qui distribue chaque soir un produit anti-moustiques, de crêpes chaque matin, d’une grande télé pour visionner les chaînes dédiées aux enfants, de mercemek çorbası, de köfte, d’une plage à cinq minutes en voiture et de jouets plutôt souvent renouvelés.

En somme, la vie est belle pour un petit homme de quatre ans et Belek ne lui paraît en rien étrange. Pourtant, cet endroit n’offre aucun véritable intérêt, tout est factice et inventé pour le touriste consumériste de préférence russe ou golfeur, tandis que certaines autres choses existent pour les travailleurs qui s’efforcent ou non de garantir un bon séjour aux étrangers. Que dire ? La promiscuité familiale est plutôt très satisfaisante et l'environnement est écrasant. Nous tentons une percée un soir, en retour de tant de pauvreté visuelle, je me paie une infection de merde à l'œil droit qui me vaut de filer dans une clinique d'Antalya le lendemain. Il existe de Belek à Lara des hôtels gigantesques qui imitent des bâtiments mondialement connus, il existe des reconstitutions antiques dans le centre de Belek, des boutiques spécialisées dans la contrefaçon, des Migros et Burger King, une plage publique contre vingt plages privées, des zones de marais comblés et des moustiques infernaux, mais surtout un vent qui fait supporter les 45°C du milieu d'après-midi. <

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22 août 2019

Antalya, otogar

> Onze heures de route depuis Ayvalık dans un confort merdique à cause de l’inclinaison des sièges de nos voisins devant qui n’auront pas fait l’effort de les remonter complètement. M. arrive à dormir, c’est sans doute le principal, et nous alternons entre somnolence, mauvais endormissement et éveil goudronneux. Premier arrêt à Izmir qui dure. A l’avant-dernière pause à Denizli, je crois, nous sortons tous les trois dans la fraîcheur ambiante qui n’annonce pas la vérité ; je sirote mon thé avec une cigarette en me rappelant être déjà passé ici, exactement sur cette terrasse et pendant ces pensées, quelques travailleurs s’affairent à laver les vitres et rétroviseurs de notre bus.

Antalya, gare routière que je connais si bien, autant que celles d’Izmir et d’Ankara finalement : ce préau spacieux qui incarne toujours un doute, ces portiques de sécurité si chiants quand on est chargé comme des mules et comme nous le sommes. N. trouve la solution pour rejoindre Belek, il faudra stopper à Serik rejoint à l'aide d'un minibus prévu pour s’arrêter toutes les cinq minutes ; il faudra patienter une heure pour s’extirper du trafic de la métropole et rejoindre l’autoroute de l’est. <

21 août 2019

Le Crabe boğuldu

> A l'occasion d'une dernière improvisation, nous suivons le conseil de notre hôte et restons une journée de plus pour profiter des environs et de la plage. En y allant, elle nous décrit les alentours depuis le port de plaisance. Au sud comme au nord, Ayvalık est peuplée de riches demeures ou de beaux ensembles collectifs, propriétés de familles d’Izmir, puis d’Istanbul. Nous glissons le long d'une sorte de lagon jusqu’à un point de bifurcation sur lequel la voiture pivote en direction des terres. Küçükköy, le village qu’elle propose de visiter colonisé par des Bosniaques, on ne sait pas trop pourquoi et une raison existe forcément, est une place qui connaît un attrait certain par l’ambiance « médiévale » qui y règne. Vieilles pierres et vieux bois offrent un nid parfait pour les ateliers d’artistes qui s’y sont établis depuis quelques années. Il s’avère que le lieu est aussi un repère pour ceux qui désirent acheter des drogues. Quelques boutiques parcourues, l’impatience grandissante des enfants nous poussent vers la place centrale pour s’offrir un petit déjeuner salé de börek accompagné d’un thé, de fromage et d’olives. Pour la deuxième fois, je bois quelques gorgées de Karadut suyu en jus. L’agitation qui règne est plus familiale qu’estivale, bien que.

Nous passons le porche d’une résidence classieuse qui borde la plage de Sarımsak, sa piscine et ses carrés d’herbe verte indiquent qu’il s’agit d’un resort de bon niveau. P. a droit de passage et de chaise-longue car le propriétaire est aussi celui de l’école de sa fille. Nous évitons de poser nos pieds sur le sable brûlant. La mer est calme, limpide et son étendue parfaite. Nous allons squatter longuement pour le bonheur des enfants. Les baignades se répètent, quelques commandes au serveur et l’après-midi file tranquillement. Arrive un moment futile où je devine que le seau en plastique de G. a dérivé dans la mer. Je n’analyse pas assez méticuleusement le courant, un homme me propose son masque alors que je m’estime à portée dudit seau. Me voilà arrivée à la brasse à ce maudit objet. En me retournant vers la plage, je remarque mon éloignement, j’opte pour une nage régulière sur le dos. Une drôle d’impression m’envahit lorsque je me retourne. Mon avancée est imperceptible, je n’étale pas la dérive du courant. Un sentiment de panique monte en moi, léger d’abord, qui sait comment le contrôler et l’inverser ? Je reprends la nage espérant régler mon souffle et les battements des jambes du mieux possible. Rien n’y fait, je suis toujours aussi loin. Il est temps de signaliser ma difficulté ; je balance mes bras en l’air en direction de la plage [je le ferai pas moins de trois fois par intermittence avec un sentiment de gravité et d’anxiété]. Si quelqu’un a vu quelque chose, il lui faudra le temps de m’approcher ou de prévenir, je dois nager encore et plus efficacement. Je m’épuiserai moins sur le dos, je rythme ma nage sur des battements de cuisse plus énergiques et un souffle destiné aussi à expulser l’angoisse. Il y a des chances que j’avance, mais cela est si imperceptible ; il me faut aussi éviter les crampes : option ultime, se laisser dériver mais je présume que le courant m’emportera vers le large ; option seconde, filer en diagonale pour porter vers le rivage à droite, option première, continuer frontalement par motivation instinctive. Noyé à Ayvalık pendant que ma femme et son amie se prélassent et que nos enfants rient et jouent, fuck it ! La panique n’est jamais très loin, mais la raison est une arme redoutable qui peut calmer les frayeurs et retarder les erreurs fatales. Je répète d’énergiques mouvements maîtrisés qui me portent plus près de baigneurs sur leurs plastiques gonflés. Cette reconnaissance me mobilise, tandis que mes jambes se font plus lourdes. A quelques brasses encore du monde des vivants, N. vient me rejoindre et soulage mes pensées. Le souffle court, les muscles engourdis, j’atteins le sable avec elle. Les filles m’avaient bien vu gesticuler sans tout à fait saisir le message jusqu’à ce qu’elles remarquent que je stagnais au large ou que je n’avançais que très partiellement. Je comprends à ce moment de pause que la condition physique est la seule issue de secours dans ces situations-là, quant à la panique elle vous tombe dessus comme elle s’échappe sans que vous y pouviez grand-chose.

Le soir tombe sagement sur cette plage qui se pare de nouveaux charmes : la mer ressemble à de l’huile d’olive dense, l'île de Lesbos se distingue dans une sorte de réfraction de la lumière, les baigneurs se transforment en ombres lointaines, la musique se veut plus électronique, et véritablement, je bénis cette bière et cette cigarette d’exister ici. Nous filons vers l’appartement de P. pour une pause éclair et le moment de se quitter à la gare routière arrive. Nous avons ressenti le bonheur d’être ensemble, alors nous sentons également la torsion du cœur ce mercredi à 23h30. <

20 août 2019

Cunda (Alibey Adası)

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19 août 2019

Ayvalık, détours dans les ruelles et l'histoire

> C'est le moment de parcourir ce lieu à la mode. A la mode puisqu'il semble que l'endroit attire autant les Stambouliotes en quête de tranquilité que les investisseurs en quête d'affaires foncières. Les boutiques artisanales cohabitent avec les franchises turques ou mondiales habituelles, les vieux marchands de paniers font face aux cafés "tendance". Nous démarrons depuis Pino Cafe en direction du sud de la ville et de la marina. Les voies perpendiculaires offrent d'incroyables sensations de paisibilité, puis en empruntant Barbaros Caddesi, le tumulte réapparaît. On s'arrête presque tous les dix mètres pour scruter quelque chose — une église convertie, une balustrade sculptée, jusqu'à un passage étrange et peuplé de locaux mêlés aux vacanciers : un passage à l'ombre d'une gigantesque vigne, je crois, séculaire sans nul doute pour ainsi recouvrir la construction humaine. Y règnent cafés, pâtisseries et une agitation incessante. Nous goûtons à une fabuleuse crême à l'amande à l'abri du soleil.

La frange portuaire anciennement dévolue à la fabrication et au commerce de l'huile se métamorphose progressivement. On aperçoit encore une ou deux cheminées industrielles qui s'élancent vers le ciel, mais les bâtiments ont été convertis en bars ou restaurants branchés. Le soir tombe et nous suivons notre guide vers où bon lui semble.

P. me raconte l'histoire d'Ayvalık et oscille dans sa conversation entre turc et français. Le traité de Lausanne de 1923 a scellé le destin de cette ville en organisant la paix, mais surtout le déplacement des populations grecques et turques à travers la mer Egée : plus de deux millions de personnes concernées. Un échange de vies quotidiennes peut-il entrer dans le cadre de solutionnements sociétaux inventés par des acteurs qui n'ont sans doute jamais foutu les pieds ni dans les ruelles pavées d'Aïvali/Kydonies, ni dans les villages de Lesbos, Crète ou Macédoine ? Ayvalık est restée à travers les siècles une cité prospère grâce à la culture des oliviers ; mais l'année 1923 a ébranlé cette force ancestrale. Aujourd'hui, une autre prospérité se devine et vient se superposer à quelques décenies d'abandon et de flou, on devine ce paradoxe à chaque coin de rue. Au travers de nos allées et venues en voiture, nous glissons du haut encore couvert d'oliveraies par des voies sinueuses que les enfants du cru arpentent vers le front de mer nettement moins populaire. Il doit exister une sorte de ligne urbaine qui séparent les nantis des humbles. J'opterai pour Nisan Caddesi. <

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19 août 2019

Assos/Behramkale

> Nous sommes arrivés à Ayvalık vers 13h00. Quelqu'un attendait notre véhicule poussiéreux [je vais avouer à l'occasion de ce souvenir posté sur internet que je n'écris plus au jour le jour depuis quelques années. J'emmène toujours un carnet par réflexe, sorte de réflexe conscient servant à entretenir doucettement le feu qui m'animait quand je voyageais seul. J'écris les premiers jours à la suite de mon retour dans le meilleur des cas, quelques semaines après dans les moins bons. Je puise différemment dans ma mémoire et note des impressions nettement moins fortes, c'est un signe de je ne sais quoi]. Nous avons senti hier soir qu'il y avait quelque chose à creuser à Assos. Nous filons vers le point culminant où git encore les vestiges d'un temple dorique/ionique dédié à Athena. Si le style classique attise notre intérêt, il existe un rectangle de 200 mètres de large sur 350 mètres de long aux pieds de ce site occupé par un village animé, nous dirions "médiéval" en France. Encore une fois, la sagesse humaine flirte avec la propension à consommer, mais la finesse ottomane sait manier l'équilibre. Nous ne nous intéressons presque jamais aux images ou aux histoires des endroits que nous allons découvrir et quand je lis les descriptions par la suite, j'admets que très souvent j'apprends des choses que j'ai voulu moi-même imaginées ou créées.

L'ascension avec une poussette à une température de 35°C allait être compliquée, c'était certain, mais M. somnolait encore lorsque le frein à main a été serré méticuleusement. Je m'enivre des pierres et des moellons déchus de leur majesté, brisés, piétinés par les cuirs, érodés par les averses déversées sous de gros nuages divins, frottant le sol naturelle et glissant de plus en plus bas. Ce sanctuaire, me dit N., est le seul sanctuaire dorique conservé en Asie ; il a été bâti un siècle avant le Parthenon. A l'habitude de la "civilisation occidentale" ou de l'Europe, un morceau de la frise de l'architrave est allé orné les galeries du Louvre ; un présent d'un sultan à Louis-Philippe en 1833. Nous contemplons chacun pour soi les panoramas. Le site est immense, je le comprendrais plus tard. Assos a accueilli au quatrième siècle avant notre ère de nombreux philosophes et Arisote y séjourne trois années. Plus tard, une mosquée viendra épouser un probable bâtiment paléochrétien et un village s'implantera. Me revient en mémoire l'histoire de la Ligue de Délos. Tout en pente, en maisons de pierre, en cours et jardins ombragés. Pendant que N. parcourt les boutiques artisanales, que M. joue avec son épée de bois, je m'impatiente en observant le manège des résidents, des touristes et des chats. Nous prendrons l'option de dîner sur place au coucher du soleil dans une maison coquette face à un paysage crépusculaire : Kabak çiçeği et mantı. Pour la deuxième fois, nous empruntons la route de nuit à destination de notre lieu de couchage, le son des graviers ou les virages abrupts me semblent familiers cette fois. <

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18 août 2019

Assos Antik Liman

> La route "aussi étroite que vertigineuse" descend de la colline vers la mer où vibre un port de pêcheurs et de vacanciers établi sur d'anciennes fondations imperceptibles. L'esprit du lieu existe encore dissimulé derrière des bâtisses dont on ne comprend pas l'ancienneté et la restauration et même si l'on s'affranchit des multiples terrasses de restaurants et d'hôtels. La digue fait l'objet de la balade apéritive pour tous les curieux. Quelques voiliers de plaisance aux barreurs téméraires ont contourné les empierrements pour s'amarrer étrave au quai par un fond très limité, mais la difficulté de la tâche n'empêche pas de rêver à cette autre manière de voyager ici : l'esprit du lieu est marin, sans aucun doute. Barbaros Hızır Hayreddin, ou Barberousse plus simplement, devenu le capitan pacha de Süleyman I en 1533, est né en face sur l'île de Lesbos et a forcément navigué sur ces eaux. Nous ne cesserons d'inviter M. à rêver le monde pirate ou corsaire.

Demain, nous ne découvrirons pas les verdoyantes vallées du Kazdağı Milli Parkı et, une autre fois sans doute, nous irons parcourir les bord du pont Mıhlı Çayı, nous baigner dans les eaux transparentes de Şahinderesi Kanyonu puis de Hasan Boğuldu, nous rafraîchir par la brumisation des Sutüven Şelalesi... Cette escapade impose une organisation certaine et une anticipation que nous n'avons pas. Qui plus est, les pourtours du mont Ida font l'objet d'un événement écologique d'envergure : une protestation internationale (héritière probable du mouvement de Gezi Park) contre les gouvernements turcs et canadiens éhontés et décidés via une filiale turque de l'entreprise Alamos Gold a exploité les ressources souterraines : Les écologistes dénoncent ce projet destructeur d’un précieux écosystème et interpellent également sur une future catastrophe environnementale et sanitaire liée à l’utilisation de cyanure pour extraire l’or, polluant les sols, les cours d’eau et les nappes phréatiques. Par ailleurs, les images satellites révèlent qu’en début août, des bulldozers ont déjà arraché plus de 195 000 arbres, soit quatre fois plus que prévu. Aujourd'hui, à l'initiative du collectif Kazdağları Kardeşliği, le pianiste et compositeur Fazıl Say offre un concert aux milliers d'hommes et femmes rassemblés. <

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17 août 2019

Assos

> Au volant d’une voiture blanche dont j'ai oublié la marque et le type, nous roulons le long du golfe d’Edremit. Au nord, la chaîne de Kazdağı ne semble pas si élevée que nous le croyions. Une seule erreur dans notre chemin, un demi-tour, et nous longeons sur quinze kilomètres le côté opposé à Ayvalık en écoutant Die Wilde Jagd. Notre point de chute est une destination que N. avait projeté depuis quelques années. L’aspect général me rappelle Çirali, mais on devine un mélange entre petits et moyens complexes résidentiels et zones de camping ou caravaning liés à la proximité d’Istanbul. Nous connaissons notre adresse du soir atteinte en cette fin d’après-midi.

Nous nous étalons sur des chaises longues les pieds dans une eau cristalline, plus fraîche comme il était attendu. Les effets saccadés du meltem (appelé aussi étésien) créent plus ou moins fortement les ondulations de la mer. Une plateforme plastique ancrée à quelques brasses multiplie nos possibilités de jouer dans l’eau avec M. qui devient progressivement un bon petit nageur. Quelle est belle cette vie qui se déroule sous nos yeux : un être en pleine quête de tout ce qu’il entoure. Et pourtant, je perçois déjà qu’à quatre ans la notion d’ennui est pesante, la notion de vexation également et qu’elles ne feront que grandir pour empeser un esprit pur. L'endroit dispose des bases solides pour se sentir bien : vous commandez à boire et à manger, on vous sert sur la plage. L'orientation du site est excellente, le lever et le coucher de l'astre solaire inondent de couleurs impeccables les roches, la terre et les arbres du coin. Côté bungalows ou résidence, la verdure prône et quelques animaux domestiques l'animent ; au choix, le client habilement considéré pour un invité dispose d'hamacs, de banquettes, d'une terrasse privative et du loisir de se sentir loin de son quotidien. Nous passons le début de nuit à planifier notre lendemain. Kanara sera notre base arrière. <

16 août 2019

Soirée improvisée

> Les déconvenues font partie de nos voyages, il ne faut plus le nier. Deux heures de bus sur la route E87, une navette pour gagner le centre et nous arrivons tandis que le soleil est près de se coucher doucement derrière les bateaux qui peuplent les quais empruntés par les hommes et les chiens. Notre option de repartir dans la foulée après location de véhicule est impossible, notre option de couchage est partie en fumée, il ne reste qu’à appeler P. qui nous attendait plutôt lundi et lui demander le dépannage nécessaire. C’est évidemment à grands bras ouverts qu’elle nous accueille dans son café au cœur de la ville. La première impression sur la ville est vite dégagée lorsque nous pénétrons chargés comme des mules dans les ruelles intérieures : l’ancienne ville grecque jusqu’à l’indépendance de 1923 conserve encore ce charme hellénistique dans les façades des maisons ; une sorte de dualité règne dans Ayvalık et offre à la fois un visage renouvelé par l’implantation des Stambouliotes et un délabrement qui laisse encore la place au visage populaire d'antan. La bière au Pino Café nous requinque, les volutes de fumée s'échappe vers un ciel bleu nuit ; la dernière fois que nous avions partagé un moment avec P. était à Rennes. Son français est toujours aussi étonnant. Nous plions bagages, elle nous amène chez elle et nous laisse son appartement. La rue et les bâtiments me font penser quelque peu à Ankara. Je sors chercher au bufe du coin un döner, un toast et une soupe. Nous partirons après le petit-déjeuner vers Assos. <

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16 août 2019

Dernier soir, dernier matin à Izmir

> Notre séjour ici doit toucher à sa fin, à moins de se vautrer dans l’oisiveté immorale. Nous n’irons pas voir le centre de la ville, nous ripaillerons un dernier soir devant un fabuleux bar cuit au charbon de bois. Une dernière discussion animée, survoltée, parfois teintée d’incompréhension réciproque, et nous prévoyons le départ le vendredi ou le samedi en direction d’Ayvalık. Louer une voiture sur Izmir ou là-bas, se poser à Assos et prolonger vers Çanakkale ou privilégier une escapade en montagne forestière ? Voilà nos questionnements éludés au matin : nous émergeons la tête cassée et décidons de partir par bus vers 15h00 pour ouvrir le second chapitre de ce voyage. La navette qui nous sort de cette nasse met une heure pour rejoindre la gare routière et durant celle-ci, la ville ne cesse de vibrer quartier après quartier. Je reconnais enfin les abords d’Alsancak, les gratte-ciels un peu ratés et cette fameuse gare routière référencée dans mes souvenirs. A quoi ressemble une fourmilière ? A Izmir très certainement. <

14 août 2019

Teos/Sığacık

> La pause de S. nous autorise une escapade vers la mer au sud de Çeşme. Nous nous laissons embarquer sur les routes du coin sans reconnaître quoique ce soit en ce qui me concerne. Je n’ai jamais saisi le découpage côtier des environs d’Izmir, les nombreuses pointes s'avançant vers Chios. Les deux spots prévus s’avèrent problématiques, on continue sur la route côtière tandis que défilent les résidences secondaires des fortunés. Ensommeillé, je constate que la voiture stoppe sur un bout de plage un peu sordide, la réaction de mes compagnons avisés car autochtones est sans appel, nous vivons les mêmes impressions. Après une vague hésitation, on se pose quand même pour grignoter un épi de maïs, partager une bière, piquer une tête dans la mer et laisser M. jeter des cailloux sur les vagues. Non loin de là, je reconnaîtrai les vestiges d’un port antique ce que confirmera le panneau parcouru avant le départ. Sordide endroit mais marqué par une présence historique a priori essentielle : la cité antique de Teos dont les vestiges résiduels composent sur les coteaux au nord un théâtre, un quartier résidentiel et quelques temples.

A deux pas de là, le site touristique et balnéaire de Sığacık pour clôturer la journée : balade dans Kaleiçi ou Kalesi qui offre au-delà des attrapes-touristes classiques quelques détours intéressants. Ici, on ne trouve aucun étranger ou si peu. L’endroit est réservé aux Turcs. Les murs qui entourent le cœur de la cité jouxtent le port de pêche et de plaisance. Les éoliennes lointaines au nord ne me donnent pas plus d’informations sur la localisation exacte de cet endroit. Un concert d’un artiste et musicien très connu aura lieu pendant notre dîner au bord de l’eau, à proximité des filets rangés des pêcheurs attentifs à ramener les bonnes prises pour les clients des restaurants. Dégustons octopus, sorte de salicornes en salade et autres délicieuses choses avant de regagner la voiture, prendre une glace pour M. et pour ma part, observer que les sites comme ceux-ci sont parfaitement organisés pour les enfants : ils sont les rois du monde du soir dans ce pays. <

12 août 2019

Izmir, Olimpiyat Köyü

> Tout commence par une bière — le métro, le taxi ou les formalités suite à l’atterrissage en terre ferme ne sont que des préoccupations passagères — et mes hôtes en ont vraisemblablement achetées. Izmir me semble de plus en plus immense, comme une sorte d'organisme vivant et luminescent. Mon fils a attendu, mais s’est endormi sur la terrasse, les filles ont gentiment traîné à table. Nous n’avons aucun programme et je crains d’avoir parfaitement déteint sur N. à moins qu’elle n'ait toujours été comme moi. Nous sommes en contre-bas d'une route et je n'arrive pas à comprendre tout à fait le lieu, le nouvel appartement est spacieux et à l'opposé des deux autres auparavant squattés. Les moustiques nous dévoreront durant plusieurs jours, alors nous opterons pour une anesthésie au raki et au joint presque chaque soir. Voilà finalement un programme qui s'accorde ou non à la fête du sacrifice du moment. M. sait qu’il y a une piscine, il a vu un chat, il bavarde sans arrêt avec nos amis et nous, nous les retrouvons ; à quoi bon se discipliner dès le début, optons pour le plaisir d’être ensemble.

La chaleur accable nos nuits. L’ivresse donne chaud. Les retrouvailles aussi. La seule issue possible est de se désaltérer avec des Tuborg et de se baigner dans cette piscine entourée des bâtiments qui ont accueilli les Olympiades universitaires il y a quelques temps. J’imagine que les entraînements et les matchs ont également été suivis de parties de sexe restées dans quelques coins de cerveaux de ci de là. A l’écart d’Izmir, nous sommes en quelque sorte prisonniers de ce complexe résidentiel : il nous faut commander au market d’en haut nos victuailles plutôt que d’y aller — une fois aura suffi à nous convaincre de ne plus jamais le faire — ou attendre le retour de S. qui bosse dans son atelier pendant que nous ne branlons rien du tout. <

12 août 2019

Αθήνα

> Au fil des années, les imprévus ou les aléas des départs comme des retours créent moins d'appréhension et on apprend à dominer l'anxiété et l'impatience. Ne comptent finalement pour avancer que les raisons matérielles. En sortant de l'Airbus A320, je retrouve l'impression laissée ici il y a déjà douze ans — il s'en est passé des choses en une décade — : une sensation d’isolement linguistique et phonétique. Me reviennent du fond de ma mémoire trois expressions. Mais cette fois-ci, je saisis parfaitement les odeurs et les saveurs s’échappant des échoppes qui bordent les entrées et sorties de l'aéroport. J’opte pour un café grec devant une figurine d'Iron-Man oubliée par un malheureux enfant, le vent murmure que la chaleur doit être accablante en pleine journée. Qu'il est bon de faire face à une multitude de visages et de langues différentes. L'homme qui n'aime pas la différence est un mystère. Siège 21C, le dernier qui aurait pu me filer entre les doigts. Les deux turbopropulseurs de l'avion DHC 8-400 d'Olympic Air me conduisent en une heure de l'autre côté de la mer Egée. Un magazine brièvement parcouru offre deux nouvelles destinations inconnues à dévouvrir un jour : Σκιάθος (l'île de Skiathos) et Χαλκιδική (la péninsule de la Chalcidique). <

7 mai 2019

19h55, vol EJU7722

> Le sempiternel stress de déposer une voiture à l'agence de location après plusieurs jours de road-trip s'envole avant nous. Des files d'humains se croisent, les uns débarquant, les autres rentrant chez eux. Nous sommes trois à bien connaître et se débrouiller de l'agitation permanente des aéroports. Avec un peu de retard, nous survolons Catania. Puis le sommet noir de l'Etna apparaît à travers les nuages comme un aileron de requin dans une mer colorée des derniers rayons du soleil. Tous les passagers de gauche se ravissent du spectacle, nous essayons de le partager aux passagers de droite. La nuit va tomber en plein ciel méditerranéen. Nous reparlerons des volcans bientôt... <

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7 mai 2019

Siracusa, éclat de la fin

> Notre timing n'est pas chargé, il suffit de quitter Siracusa vers 16h00 pour atteindre l'aéroport de Catania, rendre la voiture dans les délais en croisant les doigts jusqu'au bout, embarquer et revoir l'Etna. Prenons notre temps pour errer encore vers l'entrée de l'île occupée par un marché méditerranéen authentique entre le temple d'Apollon et le Porto Piccolo, jusqu'à la fontaine de Diane/Arthémis (1906) de la Piazza Archimede, de Lungomare Alfeo au Castello Maniace qui sert de vigie de grès à la pointe extrême de l'île, parfois à la recherche du bon plan pour donner à manger à M., de cette esplanade légèrement fréquentée à la plage de Lungomare d'Ortigia sur laquelle nous sacrifions au même plaisir que les riverains en se posant dans le sable bercé par les clapotis de l'eau sur les roches environnantes, dans les boutiques de mode et d'inspiration locale à la Piazza Duomo. Notre regard se perd dans les corniches des balcons en fer forgé, dans les cours intérieures et les ruelles enchevêtrées, notre âme s'amourache doucement de Siracusa. Bien sûr, nous ne sommes pas dupés par l'effet du "hors saison" et concevons que cette ville doit se transformer en probable purgatoire quand les files de touristes s'en emparent. L'île dissimule toutefois des quartiers paisibles sur sa frange orientale moins réhabilitée, sans beaucoup de commerces et d'animations ; nous pouvons prétendre que cet ancien quartier arabe (Mastrarua) offrent quel que soit le mois de l'année un repli bienveillant. C'est depuis ce côté-là que nous reprenons la direction de notre voiture ; on s'offre un dernier café non loin de Talete, comme pour prolonger le plus possible cette journée. On oublie volontairement le site archéologique de Neapolis, la ville moderne, les Latomies et beaucoup d'autres choses moins contemplatives, car nous sentons inconsciemment que nous reviendrons. <

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6 mai 2019

Isola di Ortigia

> Sa renommée doit venir d'abord de sa singularité géographique. Et aussi de la jalousie des Athéniens qui tentèrent en vain de la détruire, de la venue de Platon à la demande du tyran Denus l'Ancien, du mathématicien et ingénieur Archimède qui y vécut au 3e siècle avant notre ère, de Cicéron qui s'en émerveillait il y a plus de deux mille années, du martyre de Lucie brûlée vive par les Romains vers 302-303 dont l'enterrement sera peint par Caravage en 1608, de sa renaissance architecturale baroque après le tremblement de terre de 1693... Sour-ha-Koussim, selon les Phéniciens, a de quoi impressionner. Dans l'après-midi, sans tout à fait en être sûr, nous pénétrons dans l'Isola di Ortigia pour ne plus en ressortir intacts. Notre hôte a conseillé de se garer Parcheggio Talete. Les véhicules des riverains sont privilégiés. Nous débarquons nos valises sous un impeccable soleil et suivons la direction de la résidence Damarete au 73 via G. B. Alagona. L'appartement qu'on nous propose nous revigore tous : on se débarbouille confortablement, M. dessine, on range un peu nos affaires et envisageons la suite : il nous reste une journée et demie pour découvrir cette dernier point de chute.

Nous suivons le rivage, là commence la mer Ionienne. On bifurque dans la Via Capodieci que nous emprunterons encore quelques fois. Aboutissons de l'autre côté de l'île, nous ne saisissons pas le symbole qu'est la Fonte Aretusa bordée de papyrus — une source en partie cause de la fortune de la ville — et nous nous écartons des panoramas sur l'aiguade pour rejoindre les rues intérieures et la Piazza Duomo. Le synchrétisme architectural est saisissant : des colonnes doriques du pérystile du temple d'Athéna ont été conservées dans le flanc gauche de la cathédrale. L'ambiance générale et l'apaisement du dernier soir avant le départ, nous goûtons le plaisir de prendre un apéritif au vin comme les locaux dans la cour du cossu Cortile Verga. Les vins rouges (Caltanissetta) sont fameux. La nuit tombe et nos verres reflètent les nombreuses bougies. Notre soirée défile des nobles immeubles vers la Via Capodieci. L'espoir d'une meilleure nuit pour nous tous l'anime. <

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6 mai 2019

Agrigento / Valle dei Templi

> Dans la rue principale de Porto Empedocle, une brise souffle et le soleil semble plus déterminé. Nous le méritions, il me semble. Le temps du petit-déjeuner me laisse le temps de réfléchir à la possibilité que ce port à la fois charmant et repoussant, à quelques milles des côtes tunisiennes et face à la Lybie, précisément à Tripoli, soit le théâtre sordide d’une histoire de migrants. Les silhouettes aperçues des bateaux à quai, le terminal portuaire reconnu, il faut se rappeler qu’ici existe une ligne régulière pour Lampedusa. La Sicile regorge de destins maudits, cela ne fait aucun doute. Les esprits des dieux antiques doivent se lasser du défilement continu des nouveaux Ulysses. Je lirai plus tard que les croisiéristes intègrent ce port dans leur circuit, une escale culturelle.

Akrágas, colonie grecque fondée sur un promontoire exceptionnel au 6e siècle avant notre ère et qui devient une métropole antique de 200 000 âmes, selon les sources. La Ville d’Agrigente et son territoire était alors une des plus heureuses habitations qu’il y eut au monde [...] Les vignes y étaient d’une beauté et d’une hauteur extraordinaire ; mais la plus grande partie du pays était couverte d’oliviers, qui donnaient une quantité prodigieuse d’olives, qu’on portait vendre à Carthage, écrivait l'illustre chroniqueur Diodore de Sicile. Les accès aux fameux sites grecs pourraient faire peur : les files d’attente grossissent, les entrées ont l’air démultipliées ; il faut choisir ou trouver la bonne sans perdre trop de temps en voiture. On frôle la ville moderne avant de remonter sur une colline d’oliviers et d’arbustes divers. Nous espérons un voyage dans le temps en parcourant les temples doriques dont l'élévation provient d'une anastylose précoce ou leurs vestiges : Temple D ; Temple F l'un des trois mieux conservés du monde et sa monumentale statue en bronze d'Igor Mitoraj représentant Icare à terre et que nous immortalisons tous charmés par l'effet voulu de perspective ; la nécropole ; Temple A dédié à Héraclès ; Temple B (Olympiéion) dont se perçoit seulement l'échelle titanesque grâce aux ruines gisantes. Plutôt rassassiés, nous nous contentons du parcours dans l'agora inférieure.

Posés dans le parc archéologique sur une terrasse animée par les coups de vent, il est temps de se préparer à la suite du voyage. Nous ne parcourerons pas Agrigento. Je visualise tant bien que mal l’itinéraire dans ma tête ; le plus simple est, à l’heure qu’il est, de passer par Catania et j’estime une arrivée vers 17h00 à Siracusa, ce que confirme le navigateur automobile. Nous aurons une journée pour profiter de cette dernière étape. Nous bouclerons la boucle vers 16h15 en revoyant l’aéroport, la silhouette de l’Etna et la masse urbaine à ses pieds. La poussière que nous laissons derrière nous me stimule… que j’aime aussi ces signes indistinctifs de l’itinérance. <

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5 mai 2019

Porto Empedocle

> Le long de ces lignes qui nous approchent de la mer, se devinent les ruines antiques qui dominent encore sur leur piédestal naturel et assemblé. Le trafic s'est densifié à l'approche d'Agrigento ; cela paraît, comme il est dit, un incontournable. Nous poursuivons en direction des falaises de marne — le mal-nommé "escalier des Turcs" pour enfoncer le clou de la vieille confusion entre sarrasins et turkmènes —. L'astre solaire n'est pas loin de se coucher, les touristes apparemment locaux ont quitté les lieux, il est aisé de se garer le long de la route. Première vision en plongée de ces roches sédimentaires. M. tousse énormément et calme sa température à l'ibuprofène acheté à Palermo. Nous réalisons à quel point il est facile et résistant. Le vent qui souffle lui donne le sourire, les rochers à escalader, le requin rouge en main, il s'aventure avec nous du bar lounge jusqu'au palissades qui interdisent de poursuivre. Pourtant, les clichés touristiques montrent bien des hordes sur les escaliers de marne. La nature est puissante, pas plus accueillante que la Manche, on ne s'y attendait pas.

Une imposante centrale électrique a été implantée sur la plage, elle dissimule un tour monumentale ancienne, autant dire que cela ne donne guère de bonnes impressions sur la ville. Il faut encore une fois rentrer dans la masse bâtie en espérant que les rues seront franchissables pour l’étranger que je suis. Nous passerons la nuit au 42 via La Porta. L’étroite rue cache un porche, il conduit à un escalier qui débouche sur la via Roma, l’artère paisible et élégante du site : restaurants, glaciers, arbres et statue, façades soignées d’édifices publics, badauds… Seulement en compagnie des propriétaires ou de proches, nous dégustons tranquillement notre dîner sous un plafond voûté de pierre ; nous fumons une cigarette en terrasse avec notre verre de vin en observant la nuit, le vent se lève. On nous offre un dessert. <

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5 mai 2019

SS181/SS189 en direction du sud

> Reprendre la route redonne du souffle, je me répète. Suivons un bitume calé entre des reliefs verdoyants ou parfois dépouillés, dont certains recouverts par une petite agglomération de bâtisses. Nous sommes tranquilles, presque seuls, hormis lorsque les travaux et les chicanes rapprochent les véhicules. A plusieurs reprises, je stoppe devant un feu rouge installé on ne sait pourquoi et un horizon vide. Peu n'obéit pas à la règle éphémère. Durant ces trois heures au moins, nous n'avons prévu aucune pause, sauf pour les commodités de tous et pour fumer avec un café. Nous avons réservé un Bed-&-Breakfast dans une bourgade entre Agrigento et le spot de Scala dei Turchi. L'idée serait de l'atteindre avant le coucher du soleil, puis de revenir sur nos pas pour la soirée. <

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5 mai 2019

Palermo, une matinée ensoleillée

> Un dimanche reste un jour à peu près comme les autres. Nous n'avons pas voulu partir trop vite, avons senti qu'il fallait encore s'orienter vers des quartiers inexplorés. Je souhaite visualiser la bâtisse où est né le père du cardinal Mazarin qui borde la Piazza Garraffello, c'est une ruine. Nous glissons vers la Piazza Marina, ses brocanteurs qui feront le bonheur de M. et ses gigantesques ficus magnolioides, aux longues racines aériennes. « Peut-être ma préférée, dit Alajmo, car c’est la plus chargée d’histoire : c’est sur elle que donnent certains des plus beaux palais de Palerme... C’est également ici que, le 12 mars 1909, a eu lieu le premier omicidio eccellente – un meurtre dû à la mafia et jamais élucidé : la victime était le policier italo-américain Joe Petrosino, venu de New York pour enquêter sur les rapports entre Cosa Nostra et la mafia italo-américaine ». Je revois le port de plaisance pendant que mes compagnons flanent encore parmi les vendeurs.

Le soleil nous a revigoré et nous suivons la promenade que longe le Foro Italico. Nous apercevons le rivage sans souhaiter nous y rendre. « C’est que Palerme a un rapport problématique avec la mer, explique Alajmo, et ça ne s’est pas amélioré avec le temps : les balcons des immeubles construits près du port dans les années 1960-1970 regardent vers le centre-ville... Déjà, l’écrivain Leonardo Sciascia avait remarqué que Palerme lui a tourné le dos. En vain, nous tentons de rentrer dans un bar à la mode installé dans un vieux palais. Petite pause dans ce quartier défraîchi de la Kalsa mais revigoré par des placettes que la jeunesse occupe. Ici toutes les contradictions se retrouvent. C’est une zone à très haute densité mafieuse. Au Monkey Pub, la boucle est bouclée et nous traversons une ultime fois cette fameuse via Roma dont le portrait ambigu s'explique peut-être car « une partie des boutiques sert en fait à blanchir l’argent sale, tandis que l’autre est rackettée ». Le soleil tape, un dernier regard sur le plan et ce que nous n'avons pas découvert, un dernier écart en solo vers le Palazzo dei Normanni, rapide car mes deux acolytes attendent. Le réservoir est plein d'essence, en route vers le sud, l'ouest attendra une prochaine fois, si jamais. <

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