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La Route du Crabe
9 octobre 2016

Sous les étoiles d'Adrasan

> C'est la troisième fois qu'on retrouve la route sinueuse qui descend sur Adrasan. Un incendie a toutefois fait d'incroyables dégâts. Cette fois, j'ai l'impression de découvrir le bourg. Le site est toujours aussi esthétique : cette plage coincée entre une presqu'île massive et une montagne pointue. Posés dans un bungalow finalement, nous sommes couvés par un ciel parfaitement rempli d'étoiles qui me remémore ma première escapade à Çıralı. Aucune autre source lumineuse ne vient perturber notre vision. Les animaux règnent en maître et ponctuent de leurs cris le calme général (j'omets quand même les accélérations pénibles des deux roues qui filent sur la chaussée en front de mer).

Demain, nous rejoindrons le phare de Gelidonia que je veux découvrir depuis longtemps. Trois heures de marche, cela me semble possible malgré tout. Ce soir, nous avons mangé sous une pergola envahie par une vigne superbe aux grappes opulentes. Maintenant, je fume une cigarette sur cette terrasse qui donne sur un jardin, la montagne et le verger. On entend à peine le bruissement des vagues au loin qui font rouler les cailloux. Tout le monde dort dans cet univers apaisé. Nous ne sommes pas si loin des conneries habituelles, mais ici, on a l'impression qu'elles ne nous atteignent pas.

La dose est prise, mais ne suffira pas. J'aurais aimé retrouver Kabak, entendre davantage le coq et voir ses poules qui viennent entre nos jambes lors du petit-déjeuner, voir le visage de M. s'émerveiller devant ces choses simples et pourtant ultimes. J'aurais aimé ouvrir une bière sur ma chaise-longue en regardant le large et inventer ce jour où j'y viendrai en voilier. J'aurais adoré découvrir une nouvelle crique et ses eaux transparentes. Et fumer une autre cigarette à la nuit tombée bercé par le bruit des insectes et le contentement de vivre encore une fois cela. <

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2 octobre 2016

Deux nuits à Izmir

> Retour à Izmir la veille du mariage. Tout va se passer très vite, c'est dommage. L'alcool et la drogue ne vont pas arranger la sensation de courir après le temps et d'en manquer. Tout commence surtout lorsque nous nous retrouvons entre amis, M. profite de l'attention de tous et en abuse pour faire le gentil malin. Il se doute bien que cette soirée, il aura le droit de se coucher tard. En fait, je m'attends à ce qu'il s'endorme comme un roi dans sa poussette et qu'il nous laisse quelques minutes pour les autres.

Notre table numérotée 1 est la plus proche des mariés et de la piste, alors que nous y arrivons la tête embrumée et les yeux rougis, le dîner commence, la musique démarre doucement. Le hic, c'est qu'une infraction vient d'avoir lieu dans l'appartement loué par cinq amis et ils quittent temporairement le mariage pour informer la police. L'ambiance va inexorablement souffrir de ce contre-temps. Je préfère me rafraîchir avec des bières : pour une fois que je ne suis pas obligé de boire du vin blanc et du vin rouge à un mariage, autant en profiter. Arrivera le moment de prolonger la soirée au rakı. M. tente quelques sorties pour comprendre l'événement et les jeux de lumière. Il scotchera ensuite sur les danseurs et les sonorités traditionnelles jusqu'à l'endormissement.

La danse tcherkesse (origine de notre amie) théatrale et la mélodie lancinante de l'accordéon me semblent parfois familière. Le moment pourra semble long pour les Egéens qui dévoileront aussi leur pas, mais le moment est assez unique — je risque de ne le voir qu'une fois dans ma vie —. La nuit bien entamée, nous gagnons tous ensemble la piste, certains ont le droit de se moquer des autres. Le principal est cette communion heureuse qui nous anime et nous rapproche. L'heure tourne, le mariage doit s'arrêter, l'after peut avoir lieu. Je rentre avec M. en taxi jaune vers notre hôtel sans prendre le temps de faire la bise à tous. On fonce dans le nord de la ville en silence, j'achète une bière et des sucreries dans un buffe encore ouvert, je pose Milan sur le grand lit, j'ouvre ma bouteille et quelques minutes après, le glucose en moi, je sombre également. <

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