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La Route du Crabe
20 novembre 2010

En dessous du ciel

> Une partie des voyages se fait la nuit, particulièrement les grandes traversées de ville en ville... 4h00, après un sommeil rendu difficile à cause du froid qui enveloppait la voiture, je me réveille recroquevillé sur la banquette arrière. Le bruit des vagues et les premiers cris que lancent les coqs donnent vie à l'obscurité qui m'entoure. Direction le centre pour un dernier thé à Kaş. Je suis presque seul sur la route et attend impatiemment que l'aube se déclare. 5h20, l'Est montre toute sa puissance en inondant avec précipitation l'horizon et l'étendue maritime. Je revois Kalkan et la moins attrayante Finike. La route grimpe vers les reliefs d'Antalya et ses sommets oranges du Taurus. Elle sent le pin et la sève. J'arrive à Antalya. Ce retour m'émerveille plus, il s'est passé quelque chose. Cette rupture qui sonne l'ouverture en grand des sens.

Nouveau programme en arrivant à l'aéroport : je prolonge la location pour inventer un rendez-vous avec une hôtesse de l'air qui revient de Bruxelles. Je suis l'asphalte des artères périphériques en direction de Burdur, puis Denizli et bifurque dans le Milli Park de Termessos qui attend, figé depuis le tremblement de terre, l'abandon, les pillages et les découvertes scientifiques, nos regards et nos pieds excités par le site. L'ascension dans le mont Güllük est haletante, on se retrouve encore une fois dans un mélange de cultures ruinées et de végétation libre d'envahir chaque gisement chaotique dont le sens parfois nous échappe.  Une splendeur attend tout en haut : le théâtre hellénistique qui domine la vallée. Ça doit défiler sérieusement en pleine saison, mais aujourd'hui c'est assez tranquille pour que je m'allonge sur l'extrémité conservée des gradins entre le vide et le ciel. Jamais, je n'avais vu cela. L'errance dans les sentiers de la nécropole complète cet émerveillement. Les morts ont quitté leur demeure depuis longtemps, sarcophages brisés et sans dessus-dessous, mais il plane un immémorial respect des lieux. On crapahute avec le bruissement des feuillages, le bourdonnement continu des insectes pour tomber nez à nez avec ce qui fut la dernière demeure de ces hommes il y a 1 500 années. Avec quelle force pouvait-on bâtir de tel endroit ?

En revenant par la route, je croise le zoo et une grande cascade qu'annonce plus loin la gigantesque tête sculptée d'Atatürk. J'attends N souhaitant la voir comme elle a vécu pendant toute cette année. J'attendrai trois heures sans broncher, sans faillir et la nuit venue, après un magnifique malentendu, elle viendra me récupérer depuis chez elle en voiture. Foutu sentiment qui irradie le corps entier. On choisit ma pension. J'ai perdu mon sens de l'orientation, déboussolé, déconcentré. Elle m'emmène dans son quartier pour dîner : Neyzen Demhane (Yeşilbahçe Mh. 1480. Sok 07160 Muratpaşa). Les clients habituels et les musiciens créent l'ambiance. On boit du rakı, on écoute, on discute. Je suis perdu dans son vrai monde dont l'entrée semble impossible pour l'étranger de passage. Elle est belle. <

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